Canne

La canne est le nom générique d'un accessoire allongé en forme de bâton, touchant le sol et tenu à la main, essentiellement conçu pour aider la marche, quoiqu'il puisse remplir d'autres fonctions.



Catégories :

Phénomène de mode - Accessoire de mode - Mode masculine - Aide technique à la mobilité ou à l'accessibilité - Équipement de randonnée

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Définitions :

  • Nom générique donné à plusieurs espèces de roseaux, tels que le roseau commun, la canne d'Inde, la canne odorante, le bambou, etc; Nom... (source : fr.wiktionary)
  • cannes - intérieur particulièrement propre, particulièrement bon état. (source : cgi.ebay)

La canne est le nom générique d'un accessoire allongé en forme de bâton, touchant le sol et tenu à la main, essentiellement conçu pour aider la marche, quoiqu'il puisse remplir d'autres fonctions (mode, outil, arme, sport, etc. ). La canne tire son appellation du végétal du même nom «canne» (nom vernaculaire du roseau), par ressemblance de nature et de forme avec le matériau employé originellement pour sa fabrication. La naissance de cette signification de canne comme «bâton de promenade» date du XIIe siècle (Larousse) [1]. À partir de là, la canne connaît d'innombrables déclinaisons de forme, d'usage, ou alors d'appellation.

L'histoire de la canne

La canne féminine au XVIIIe siècle.

La nuit des temps

Si les premières cannes furent en premier lieu probablement de vulgaires bâtons ramassés et utilisés comme tels de façon multi-utilitaire, puis progressivement ouvragés et façonnés, il est complexe de dater la naissance de la canne qui, en outre, n'adoptera cette appellation générique commune que particulièrement tardivement[2]. Cependant, on reconnaît volontiers à l'Égyptien Toutânkhamon la qualité de premier collectionneur de cannes (on en a retrouvé plus d'une centaine de tous types dans son tombeau) [3], mais la canne est aussi évoquée dans l'Antiquité grecque (par exemple Œdipe face au Sphinx) et dans la Bible (surtout l'épopée de Moïse ou l'histoire de Jacob) [4], aussi présente chez les Assyriens ainsi qu'à Rome où l'ensemble des nobles ont une canne. Même le légionnaire romain joint à son uniforme une canne-bâton (canne centurion). À l'exception de ce dernier exemple, la canne fait alors fréquemment office de signe différentif, hiérarchique ou nobiliaire[5] même s'il est probable que la canne poursuit une destinée plus rustique et plus utilitaire dans les couches plus rurales de la société.

La période moderne

Plus près de nous, au Moyen Âge, la canne se fait plus discrète au profit de l'épée chez les féodaux. On note cependant les spécificités des cannes de pèlerinage nommées bourdon[6]. Ce sont des cannes hautes, gainées ou cloutées, quelquefois sculptées, avec une poignée disposant d'une butée inférieure (pour bloquer la main ou lier une gourde). La Renaissance remet timidement la canne en vogue. François Ier possède une canne, la régente Catherine de Médicis aussi. Elle reste par conséquent l'apanage des monarques et de la noblesse, comme plus tard pour Louis XIII, puis Louis XIV, mais aussi pour leurs courtisans qui en firent l'une des règles de l'étiquette et même pour leurs comédiens qui l'utilisent comme symbole de grandeur dans leurs pièces. Le XVIIIe siècle rencontra cependant la canne de femme, un haut bâton enrubanné (ou à dentelles) [7] et c'est aussi de cette époque que date l'usage codifié de la canne comme instrument de défense, ce qui deviendra un art martial bien français. On se souvient aussi de la particulièrement riche canne de Richelieu, témoignant de son rang et de son aisance[8].

La Révolution marque une étape et une parenthèse extravagante. La canne se démocratise et l'épée autonome décline : la canne-poudrier de la garçonne, et en particulier, les énormes cannes torsadées (cannes-gourdins) des jacobins (appelées arbre de liberté ou pouvoir exécutif), avec des variantes comme les grosses cannes ficelées d'une corde à boyau et fourrées d'une épée des Invraiidentiques, tandis que de leur côté, les muscadins qui se moquaient des jacobins[9], exhibaient néenmoins eux aussi une grotesque canne-gourdin[10].

La période contemporaine

Après cette joyeuse période d'excentricité collective, c'est essentiellement la Belle Époque qui fera de cette orthèse un accessoire viril et élégant de la mode masculine bourgeoise (et non plus uniquement aristocratique), complément indissociable du frac noir et de la redingote. On parle alors d'âge d'or de la canne[11] et , selon Pierre Faveton (bibliographie infra), «Il est alors aussi incongru à un homme de sortir sans sa canne qu'à une femme de se promener sans chapeau». Énormément de grands bijoutiers-joaillers se sont investis dès le XIXe siècle dans la fabrication de luxueux pommeaux de cannes, comme Fabergé, Cartier, Tiffany, etc. [12] Les cannes de cette époque sont d'ailleurs, actuellement, les fleurons de belles collections.

Depuis, après un dernier engouement lors de la période Art déco, la canne revient sporadiquement dans la lumière, quoique, aujourd'hui, ce soit fréquemment par dérision ou par excentricité individuelle (exemples récents célèbres : le peintre Dali, le faux comte de Saint-Germain, certains artistes du mouvement gothique, etc. ) [13], à l'exception des utilisations particulièrement spécialisées (médicales ou sportives).

L'inoubliable Charlot et sa canne de bambou.

La symbolique de la canne a ainsi singulièrement évolué

Au plus loin qu'on remonte dans le temps, la canne fut jadis associée aux images du patriarche (Moïse), du pouvoir (crosse de l'évêque ou du monarque), du berger, du pèlerin (Compostelle), puis à celle du maître à danser (canne-pochette). Actuellement, quoiqu'elle connaisse une réelle désaffection depuis le début du XXe siècle, autre qu'utilitaire, elle s'identifie toujours à l'image de la vieillesse[14], à celle du magicien et , de plus en plus, à celle du randonneur, retrouvant ainsi son utilité première pour la promenade.

Mais qui peut oublier la célèbre silhouette de Charlot et sa canne de bambou flexible ou les cannes virevoltantes des Dupont et Dupond de Hergé ?

Cependant, l'histoire démontre que de tout temps, la canne a eu ses trois fonctions principales qui emportent l'ensemble des autres : l'appui, la parade et la défense[15].

La canne peut être classée en quatre catégories
  • la canne d'agrément, ou alors de prestige, dite aussi «canne vestimentaire», qui est un accessoire raffiné de la tenue masculine qui s'affiche.
  • la canne orthèse, plus indispensable au déplacement ainsi qu'à la marche : ordinaire, spécialisée (cannes respectant les traditions du monde rural) ou médicale.
  • la canne à dispositif qui est ingénieuse et qui cache toute sorte d'usages et d'objets plus ou moins utilitaires, inoffensifs ou non.
  • la canne sportive, respectant les traditions (art martial) ou plus contemporaine (bâton de randonnée).

Néanmoins, cette catégorisation n'est qu'une commodité. Il n'est pas forcément facile, ni pertinent, de distinguer les cannes entre elles, ni de les regrouper, surtout selon leurs différentes utilisations qui s'interpénètrent : la canne d'agrément peut aussi servir de riche orthèse ; la canne sportive n'est pas à proprement parler une canne orthèse quoiqu'elle en dérive mais la canne de randonnée sert néanmoins aussi d'aide à la marche et , en outre, peut être uniquement de loisir et non pas sportive (donc une forme d'agrément)  ; les cannes dispositif sont fréquemment des cannes d'agrément quelquefois luxueuses, etc. En réalité, les modèles de canne et leurs usages sont si diversifiés que leurs seuls points communs sont quelquefois uniquement d'être un accessoire tenu à la main et leur forme générale commune silhouettée en bâton.

La canne et ses composantes

Les divers éléments d'une canne

Le bâton (ou fût) de la canne classique est fréquemment en bois, quelquefois sculpté[16], marqueté, incrusté ou gainé (en cuir ou tressage, par exemple), choisi selon ses qualités esthétiques ou plastiques, précieux ou non (ébène, érable, châtaignier, palissandre, etc. ). Il peut être aussi en jonc, en métal ou en matériau composite (modèles sportifs). Le bâton est plutôt de section cylindrique mais peut être carré (voire, plus rarement, triangulaire ou ovale) pour les modèles sportifs surtout. Habituellement le bâton est droit et lisse (hormis les cannes sculptées) mais il peut être torsadé, noueux et de forme vermiculaire.

La poignée. En théorie, le bâton s'orne, d'une manière différente, d'un pommeau (milord ou en boule) ou d'une crosse (classique, en équerre ou Derby), où l'or, l'argent, l'ambre et l'ivoire peuvent servir de support à de véritables œuvres d'art, peut-être incrustées de pierres précieuses ou de nacre. On trouve aussi des pommeaux et des crosses aux formes les plus diverses, surtout des têtes humaines ou d'animaux. Cependant, la poignée est le plus fréquemment en bois, en métal ou en matière plastique sur les modèles contemporains courants, ou alors en caoutchouc pour certaines poignées conçues pour la randonnée. Lorsque la canne a une vocation sportive particulièrement marquée la poignée fait corps avec la canne, raison pour laquelle celle-ci renoue volontiers avec son appellation native de «bâton» (cf. infra).

Les éléments annexes. À l'extrémité inférieure, on trouve l'embout (férule), le plus souvent en caoutchouc, ou en métal en forme de pique (quelquefois amovible), tandis qu'à l'extrémité opposée, la présence éventuelle d'une dragonne peut permettre l'attache au poignet. Aussi au niveau supérieur, le bâton peut être renforcé, ou décoré, par une ou des bagues (viroles) et se voir doter d'un accroche-canne. Certaines cannes sont même pourvues d'amortisseurs.

La longueur de la canne est variable pour un confort de marche optimum

Pour utiliser judicieusement une canne pour soulager le poids du corps il faut que le coude soit à 30° de flexion. A cette angulation le muscle triceps brachial (à la face postérieure du bras) est à son maximum d'efficacité. En plus d'une longueur suffisante ou réglable par tubes télescopiques, une petite astuce permet d'obtenir cet angle parfait du coude. En adoptant une posture relaxée, les pieds écartés dans un position confortable habituelle, bras le long du corps, la poignée de la canne doit être au niveau du pli de flexion du poignet. Selon la forme du pommeau, par exemple avec des poignées courbées, il est quelquefois plus facile d'inverser la canne (poignée contre le sol) pour contrôler si la férule arrive au niveau du poignet. Le plus souvent, les cannes pour les hommes mesurent entre 90 et 96 cm. Pour les femmes, cela fluctue entre 85 et 90 cm. Habituellement la canne est portée du côté opposé à la jambe, ou au pied ou à la hanche affaibli, quel que soit le côté de la main dominante. Pour marcher, il faut avancer simultanément la jambe affaiblie et la canne puis basculer la jambe saine en avançant. Le corps opère un transfert de poids sur la jambe saine et ainsi de suite. Quand une canne est utilisée pour maintenir l'équilibre, il faut se fier à son corps et adopter la position qui offre le plus de confort[17].

Des cannes pour l'ensemble des usages

Les cannes d'agrément.
Exemple contemporain du pommeau ouvragé sur une canne d'agrément d'exception.

Si certains modèles de prestige servent seulement d'éléments décoratifs et de standing censés traduire la personnalité de leur propriétaire, d'autres sont réellement prévus pour l'aide à la marche normale en ville, tout en ayant une esthétique soignée qui les prédestinent à un usage plus mondain. Il s'agit ici presque seulement d'un accessoire masculin, si on excepte le cas des élégantes cannes féminines du XVIIIe siècle (cf. supra) et les modes cycliques dans la bourgeoisie féminine contemporaine. C'est d'ailleurs comme attribut indispensable de la mode vestimentaire masculine que ce type de canne à connu un engouement populaire sans précédent, surtout durant tout le XIXe siècle. On trouve peu de crosses arrondies dans cette catégorie. Ce sont plus volontiers des cannes à pommeau, ou derby (surtout pour les femmes). La poignée est en fait l'élément le plus travaillé et le plus précieux. C'est le plus souvent elle qui confère, à la canne, son caractère et son originalité[18].

Les cannes orthèse

Cette catégorie connaît plusieurs variantes, le plus souvent toutes utilitaires, avec un caractère plus ou moins marqué d'aide à la marche.

On pense en premier lieu aux usages urbains classiques de la part des personnes âgées, des deux sexes, avec une canne le plus souvent ordinaire, conçue pour perfectionner l'appui au sol et aider au franchissement d'obstacles simples comme un trottoir. On trouve ici l'ensemble des types de poignée, avec une prédilection pour une simple crosse arrondie. C'est , avec les cannes anglaises (ci-dessous), l'exemple le plus courant et le plus visible aujourd'hui de la présence des cannes dans notre vie quotidienne.

Les cannes spécialisées ou respectant les traditions : Ces cannes sont en particulier mentionnées pour des raisons historiques et ne subsistent plus, généralement, que pour le folklore. Il s'agit surtout des cannes en usage dans le monde rural, fréquemment plus rustiques, en même temps, d'une utilité indéniable. Ainsi, la houlette du berger lui sert tout à la fois à se déplacer, à se reposer, à diriger son troupeau, à tuer le serpent, à écarter les broussailles, etc. À noter que la crosse épiscopale que tient l'évêque symbolise précisément la houlette du berger conduisant ses brebis. Les noms de ces cannes changent suivant les régions selon l'utilisation spécifique, des formes et du matériau utilisé (makhila au Pays basque, boulade dans le Massif central) [19]. Les poignées sont , soit absentes ou faisant corps avec le bâton (peut-être couronnées par un petit pommeau aplati), soit des crosses arrondies. Dans cette catégorie, on pense aussi par ressemblance, aux cannes plus symboliques qu'utilitaires des compagnons[20], aux cannes maçonniques, ou alors aux cannes des tambours-majors (ou bâton major) qui sont aussi une variante des cannes de métier (cf. infra).

Les cannes dites «médicales» répondent aux obligations de la rééducation, d'un handicap ou du grand âge. On en dénombre plusieurs types : les cannes orthopédiques (concerne en particulier une adaptation de la poignée)  ; les cannes à plusieurs pieds (tripodes ou quadripodes) qui ont un bâton supérieur vermiculaire et une poignée horizontale, qui peuvent être une alternative ou le prélude au déambulateur. En Europe, pour des pathologies plus lourdes, les cannes dites anglaises ou canadiennes sont prescrites. Elles ont été découvertes, comme leur nom ne l'indique pas, par un ingénieur français, Emile Schlick, sous le nom de canne-soutien. Elles comportent une poignée horizontale et un support incliné pour l'avant-bras. Le bâton le plus souvent en métal, est réglable en longueur par tubes coulissants, elles s'habillent désormais de plastiques de couleur pour les poignées et l'appui anté-brachial. Leur mode de réglage est le même que celui décrit plus haut pour la canne simple. Aux USA, pour ces mêmes pathologies les béquilles à appui axillaire sont toujours beaucoup utilisées. Enfin, aujourd'hui, une canne blanche signale une personne malvoyante. Ces cannes n'ont par conséquent rien à voir avec un type spécifique de canne à dispositif (infra) qui par le passé cachait une petite trousse de soins.

Les cannes à dispositif 

Elles furent innombrables jadis, démontrant que l'homme du XIXe siècle surtout avait une imagination débordante. Elles font la joie des collectionneurs mais certains modèles sont toujours commercialisés actuellement.

Pour une fonction utilitaire, plus ou moins gadget, avec des possibilités illimitées que cachait le fût de ces cannes : lorgnette, tabatière, pipe, toise, parapluie, siège ou trépied, pince cueille-fruit, fiole à parfum ou poison, flacon et verres, simple tire-bouchon (ou attirail complet pour le pique-nique avec couteaux, fourchettes, tire-bouchon, flacon, poivrière et salière), montre, boussole, jeux de dés, lampe, porte-cigarettes (avec briquet ou allumettes et grattoir, ainsi qu'un cendrier) ou porte-gants. On évoque aussi l'existence de cannes encrier, éventail, violon, jeu d'échecs et trousse à outils (par exemple des sécateurs, des couteaux-scies, haches et marteaux. ) [21], des cannes se transformant en trépied pour y fixer un appareil photo, des cannes pour la pêche (cannes de promenade renfermant une canne à pêche complète, parfois une épinette ou un harpon), des cannes pour l'écriture ou le dessin (avec encriers, porte-plume, porte-mine, grattoir, matériel de peinture, chevalet, etc. ), des cannes farces et attrapes (avec pétards, lance-confetti, jet d'eau, etc. ) et bien d'autres ![22]. Il y eut même des cannes de voyeur dissimulant une sorte de périscope et on trouve actuellement des cannes à roulettes comportant un cabas[23] et des cannes podomètres.

Pour une fonction de défense : dague, épée, dard, matraque, embouts plombés, sarbacane, pistolet ou fusil[24]. Quoique ce type de canne ait en particulier fait fureur à la Belle Époque pour remplacer l'épée déclinante, on trouve toujours certains modèles contemporains.

Parmi ces cannes à dispositifs il faut faire une place historique aux cannes de métiers, par exemple, la canne-toise de maquignon (pour vétérinaires et marchands de chevaux) qui étaient des cannes de mesure, comme les cannes des croque-morts, du tonnelier, du drapier, du laitier. Il y avait aussi la canne-vrille du forestier, la canne-velte (jauge du marchand de vin ou de grains), la canne de dégustation du représentant en liquides, la canne soude (plombage des marchandises par l'employé d'octroi), etc. [25]

Bâton de randonnée respectant les traditions.
Les cannes sportives.

On pense en premier lieu à la canne ou bâton de randonnée (ou bâton de marche) qui peut avoir un usage sportif ou uniquement de loisir. Dans une pratique sportive, sa fonction n'est pas uniquement l'aide à la marche, mais apporte un soutien dans l'effort (impulsion, répartition), l'atténuation des chocs pour la descente, la réception ou le franchissement d'obstacles délicats. Dans les hypothèses de marche intensive dans la nature, tenant compte de la variété des sols rencontrés, on attachera surtout de l'importance à la qualité de la férule (avec quelquefois une pointe en tungstène ou en carbure et des formes variées, en croix ou en cylindre), ainsi qu'à la présence d'une dragonne, ainsi qu'à la légèreté de la totalité et sa capacité d'absorption des chocs (flexibilité). Dans le cas de la randonnée citadine (en fort développement), et quoique l'usage d'un appui soit plus rare, le bâton de marche, ou alors une canne classique le cas échéant, sera plus sobre et plus élégant, avec un simple embout caoutchouc. Certains modèles pour la promenade champêtre sont au contraire rustiques, d'un seul tenant, en bois, comportant fréquemment aujourd'hui une boussole incrustée en guise de pommeau, mieux adaptés à la randonnée promenade. D'autres plus particulièrement élaborés, fréquemment pour un usage plus sportif, sont en aluminium ou matériau composite (fibre de verre, carbone ou zycral), de plus en plus fréquemment télescopiques, avec amortisseurs[26]. Enfin, on trouve des poignées de toutes formes : droite, recourbée comme une canne classique ou légérement en avant, en forme de pommeau ergonomique ou en béquille derby[27].

À noter le cas spécifique de l'Alpenstock[28] utilisé jadis en milieu alpin, dont est dérivé le bâton de ski et celui des cannes spéciales pour le trekking ou pour la marche nordique qui est un sport intensif complet qui se pratique avec deux bâtons (ressemble légèrement au ski de fond, mais en marchant à pied !). Les cannes en question sont des bâtons de marche de haute technologie. Ils ont surtout par principe une poignée ergonomique, une férule démontable particulièrement adaptée, avec rondelle amovible, et toujours une dragonne, le plus souvent large et ajustable.

Il faut aussi faire une place à part à la canne légère (ou bâton), en châtaignier, utilisée dans l'art martial qu'est la canne de combat où l'instrument, quoique dérivant des cannes de marche, ignore complètement cette dernière fonction. Les cannes eurent un temps une crosse arrondie. Actuellement leur poignée fait corps avec le fût. Ce sport se pratique avec une ou deux cannes. Il se pratique aussi avec un bâton, appelé ainsi parce que, au contraire de la canne, il se tient à deux mains et ne comporte pas de poignée au sens strict (il est aussi plus long).

Enfin, pour l'anecdote, on signalera qu'on se servit jadis aussi de canne sarbacane pour s'exercer au tir de fléchettes sur cible et que certaines cannes dissimulaient une cravache dans leur fût pour faire de l'équitation (voir les cannes à dispositifs).

Canne ou bâton ?

Il est périlleux de trancher cette querelle vis-à-vis de ceux qui pensent que les différents bâtons de marche ne sont pas des cannes et inversement. La canne est historiquement un bâton qu'on a dénommé canne en effet tardivement (seconde moitié du Moyen Âge). Est-ce à dire que la canne ne serait qu'une variété de bâton, ou alors une divergence devant être distinguée à part ?

Discussion de trois arguments contre l'assimilation bâton/canne

En toutes hypothèses, quoique des bâtons soient aussi commercialisés par les marchands de cannes, trois arguments sont avancés pour contester l'assimilation du bâton à la canne, quant à leur usage, à leur structure et leur forme respectifs.

  • On objecte en premier lieu que la canne est réservée à la marche et au soutien. Pourtant, jusque là, comme ensuite, la canne a toujours eu de multiples usages (défensif, utilitaire, de soutien, et symbolique), de sorte qu'il semble erroné de cantonner respectivement la canne et le bâton dans un champ spécifique et de les distinguer de ce point de vue. D'ailleurs, le sport dénommé «canne de combat» ne vise ni le soutien, ni la marche et les cannes de prestige ne servent presque jamais à la marche. À l'inverse, un bâton de randonnée sert bien à la marche et même au soutien (par exemple lors d'un franchissement), ainsi qu'à l'impulsion, comme une canne classique, mais dans des circonstances de terrain différentes. C'est l'intensité et la proportion de chaque fonction qui change. Ceci accentue effectivement certaines particularités qu'on retrouve peu ou pas sur les cannes ordinaires. Mais les différences sont aussi flagrantes entre une canne classique, une canne de prestige, une canne médicale et une canne à dispositif. Cependant, le mot «bâton» sonne bien à l'air du temps, celui du retour à la nature, colle idéalement avec son usage non urbain et semble renouer avec ses lointaines origines. Un concept de canne «verte» en somme.
  • On a avancé que la canne était principalement ouvragée et constituée de plusieurs morceaux divers (dont la crosse) au contraire du bâton qui, en outre, n'aurait pas de poignée. On pourrait objecter dans ce cas qu'il s'agit bien d'une canne mais réduite à son bâton. Mais aujourd'hui, une canne à crosse d'un seul tenant peut aussi être appelée bâton pour souligner sa rusticité[29], alors que les bâtons de randonnée ou de marche actuels sont à la fois particulièrement élaborés, usinés et assemblés de plusieurs parties, dont une poignée le plus souvent en caoutchouc.
  • Enfin, un dernier argument consiste à souligner que le bâton aurait certes une poignée mais faisant corps avec lui. C'est ici la silhouette de l'objet qui est en cause. C'est même ce qui justifie que de rares négociants distinguent les cannes de randonnée, des bâtons de randonnée, lorsque bien même ils ont strictement les mêmes usages et qualités ![30] Néenmoins les cannes à pommeau et certaines cannes blanches sont aussi profilées comme des bâtons et nombre de bâtons de marche modernes ont une poignée derby, comme une canne classique.
Probablement plus une question d'image qu'une réelle distinction

Cependant, l'argument silhouette met l'accent sur l'image sportive et terrienne à laquelle renvoie la randonnée, fort éloignée de l'image la plus commune de la canne contemporaine, avec une crosse recourbée, auxiliaire urbain de la vieillesse. Ceci, additionné de la dimension nature déjà évoquée, semble expliquer que la canne retrouve son appellation originelle de «bâton» dans ce cas (quoiqu'on parlait jadis aussi de bâton de vieillesse et qu'on parle tout autant actuellement de canne de randonnée). À cela s'ajoute quelquefois une dimension respectant les traditions et symbolique. A titre d'exemple, on reçoit la makhila, qualifiée aussi de bâton de marche, comme on reçoit un bâton de vie, avec une certaine solennité. Ici encore la comparaison avec l'image habituelle de la canne semblerait vulgaire.

Tout ne serait par conséquent finalement qu'une question d'image et d'identité, ou alors de tradition, en notant que cela se dissout quelquefois en pratique : par exemple, on parle plutôt du «bâton» de berger, mais si on doit le distinguer de son homonyme qui est un saucisson, il sera naturel de qualifier le premier de canne et le second d'aliment ou de charcuterie. On ajoutera que l'expression des cannes est aussi une question d'époque et d'inspiration. À l'âge d'or de la canne on disait du dandy qu'il se promenait la badine (ou la baguette) à la main[31]. Le bâton était réservé aux rustres.

Ainsi la canne serait un terme générique qui ne préjudicie en rien à ses usages et appellations spécifiques, chacun avec ses caractéristiques et ses traditions propres, liées à une origine commune qui se perd quelquefois dans la nuit des temps : au tout début, probablement une branche tombée de l'arbre qui une fois dépouillée fit un bâton qui servit à l'homme à se défendre, à s'appuyer, probablement à fouiller, ainsi qu'à bien d'autres usages toujours, qu'on peut se plaire, ou non, à distinguer actuellement dans des utilisations et des appellations entremêlées.

Citations

  • Alphonse Karr[32] : «Tu plantes ta canne, le lendemain un rosier a poussé.»
  • David Lloyd George : «Un socialiste est un homme qui ne fait aucune différence entre une canne et une ombrelle parce que l'ensemble des deux tiennent dans un porte-parapluies.»
  • Serge Gainsbourg : «L'amour est aveugle et sa canne est rose.»
  • Gao Xingjian : «Seule la canne est plus solide que les expériences pour s'appuyer.» (Extrait de La Montagne de l'âme)
  • Jérôme Touzalin : «L'intuition est à la connaissance ce que la canne blanche est à l'aveugle.»

Curiosités

  • La canne à dispositif est ancienne : Charles VIII de Suède (XVe siècle) possédait déjà une canne avec une poignée constituée d'un haut flacon en cristal de roche rempli d'un parfum pour homme et Henri VIII d'Angleterre (XVIe siècle) avait une canne de jonc armée de 2 petits pistolets à rouets.
  • Les muguets (gentilshommes dandys du XVIIe siècle) bombardaient de bonbons de sucre ou de cornets à billets doux, les demoiselles se promenant dans les jardins du Palais-Royal, avec des cannes sarbacanes.
  • Au XVIIIe siècle, Alexandre Jean Joseph Le Riche de la Poupelinière, dit «La Popelinière», possédait une canne valant une fortune (plus de 10 000 écus d'or à l'époque).
  • En 1687, le compositeur français Jean-Baptiste Lully meurt des suites d'un malencontreux coup de canne (dit bâton de direction, pour diriger l'orchestre) qu'il s'était donné lui-même en dirigeant l'un de ses ballets.
    Le chef apache Géronimo et sa canne : en particulier un signe d'autorité.
  • À partir de 1834, Balzac exhibe une canne monstrueuse, sertie de turquoises, qui cache aussi le portrait de son aimée [19]
  • Depuis 1880, une canne à pommeau d'or est remise habituellement chaque année par l'administration portuaire de Montréal à un capitaine d'un navire océanique ayant réussi à atteindre la destination sans escale [20].
  • En 1871, en pleine répétition de son opérette «Les brigands», Offenbach brise sa canne avec une violente exubérance pour réveiller l'ardeur de ses chanteurs [21]
  • La «canne à absinthe» du peintre Toulouse-Lautrec (XIXe siècle) cachait aussi une petite visionneuse qui permettait de passer des vues de femmes nues.
  • Le célèbre repris de justice, René la Canne tient son surnom de l'orthèse sur laquelle il devait compter suite à une blessure de sa jambe par arme à feu.
  • La canne blanche utilisée par les malvoyants français (entre autres) est le plus souvent jaune en Belgique et verte en Argentine [22].
  • Mme Schaller 76 ans et M. Smith 52 ans, tous deux marchant avec une canne, se sont frappés l'un l'autre avec leur orthèse en se croisant, le 29 mars 2007 à Toronto, en pleine rue. Résultat de leur refus de priorité mutuelle : deux ans de prison avec sursis et deux blessures d'orgueil [23]
  • La canne a repris une popularité soudaine avec la série télévisée américaine Docteur House dans laquelle le protagoniste, House, marche avec une canne suite à un caillot dans la jambe.

Notes et références

  1. Pierre Faveton précise que le mot canne viendrait de «kanch» (canne en hébreu) qui aurait donné «Canna» en latin, d'où proviendrait l'appellation française, in «Les Cannes» (infra)
  2. Selon Pierre Faveton «La canne n'a pas d'âge. La première canne a dû être découverte spontanément dès que l'homme, se saisissant d'une branche cassée, a compris le parti qu'il pourrait en tirer» (bibliographie infra).
  3. Au moins 130 modèles différents. Plus de 300, selon le site d'un fabricant spécialisé
  4. Selon l'histoire de la canne sur le site d'un fabricant spécialisé et un résumé de l'ouvrage de Pierre Faveton (bibliographie infra)
  5. Selon l'histoire de la canne sur le site d'un spécialiste des cannes anciennes et de collection
  6. Du latin «burdus» : bâton, selon Pierre Faveton (Bibliographie infra)
  7. Selon le site d'un fabricant spécialisé, cannes-fayet. com
  8. Selon l'histoire de la canne sur le site d'un spécialiste des cannes anciennes et de collection
  9. Royalistes progressistes (du nom de leur parfum favori : le musc) affichaient au contraire des jacobins une mise soignée
  10. Voir l'histoire de la canne sous la Révolution
  11. De multiples sources, dont maxe. be, creationsmirdi. qc. ca et donoyer. com
  12. Selon le site d'un fabricant spécialisé dans les cannes de prestige
  13. À noter une élégante exception avec l'acteur-danseur franco-américain Fred Astaire (milieu du XXe siècle) qu'on voyait quelquefois avec une canne (dans Le Danseur du dessus)
  14. On se souvient de l'image du général Charles de Gaulle marchant avec sa canne sur la lande irlandaise après sa démission, ou du président américain Roosevelt à Yalta
  15. Comme le souligne Pierre Faveton précité
  16. Dans les régions montagneuses, les cannes sculptées sont prisées aujourd'hui comme souvenirs touristiques, en dehors de leur utilité fugitive d'aide à la promenade. On pense aussi aux cannes que sculptaient les marins en souvenir de leurs périples, mais il peut aussi s'agir de véritables chefs-d'œuvre sur des cannes d'exception
  17. Ces informations techniques proviennent du site d'un fabricant spécialisé dans les cannes de prestige [1]
  18. Pour des exemples contemporains de pommeaux et cannes d'orfèvres [2], [3] ou de cannes de luxe [4], [5] et [6]
  19. Selon le site d'un fabricant spécialisé [7]
  20. symbole du voyage et du Tour de France du compagnonnage et de la droiture du compagnon
  21. Selon cet historique de la canne déjà évoqué [8]
  22. Selon le site d'un négociant en cannes de collection [9]
  23. Pour un exemple [10]
  24. Pour des exemples contemporains d'une bonne partie de toutes ces cannes [11] et [12]
  25. Selon le site d'un fabricant spécialisé [13]
  26. Voir sur un site spécialisé les explications concernant l'utilisation des bâtons de marche [14]
  27. Pour un exemple [15]
  28. C'est un bâton ferré, dit «des Alpes», utilisé jadis pour les excursions en montagne
  29. Pour un exemple [16]
  30. Une canne de randonnée [17] et un bâton de randonnée sur le même site [18]
  31. Selon Pierre Faveton (bibliographie, infra)
  32. Écrivain français du XIXe siècle plus réputé pour son commerce de fleurs coupées que pour ses œuvres

Voir aussi

Bibliographie

  • (en) Albert E. Boothroyd, Fascinating Walking Sticks, Liberty Cap Books, (1970), 205 pages
  • (en) William J. Burtche, The Romance behind Walking Canes, Dorrance and Company, (Philadelphie 1945)
  • René-Marie Cazal, Essai historique, anecdotique sur le parapluie, l'ombrelle et la canne et leur fabrication, F. Malteste et Cie, (Paris)
  • René-Marie Cazal, Le Parapluie, l'Ombrelle et la Canne, (1984)
  • Sergio Coradeschi et Maurizio De Paoli, Les collections : les cannes, Celiv, (1993)
  • (it) Sergio Coradeschi et Alfredo Lamberti, Editoriale Giorgio Mondadori & Associati, dall'essenziale allo stupefacente, Bastoni (Milan 1986), 196 pages, 28 x 38 cm, ISBN 978-8837409753
  • Collectif, La Canne et ses mystères, Musée de Carouge, (Genève 1998), 137 pages
  • Catherine Dike, Les Cannes à dispositif, un monde fabuleux et méconnu, Éditions de L'Amateur, (Paris 1982), ISBN 2-85917-023-5
  • (en) Catherine Dike, Cane Curiosa, from Gun To Gadget, Éditions de L'Amateur, (Paris 1983), 374 pages, ISBN 2-85917-027-8
  • Catherine Dike et Guy Bezzaz, La Canne objet d'art, Éditions de l'Amateur, (Paris, Genève 1988), 398 pages, ISBN 2-85917-074-1
  • (en) Catherine Dike, Canes in the United States, Illustrated Mementœs of American History, 1607-1953, Cane Curiosa Press, (Ladue, Missouri (USA) 1994), 398 pages, ISBN 0-9642249-0-9
  • (en) Catherine Dike, Walking Sticks, Shire Album 256, Shire Publications, (2002), 32 pages, ISBN 0-7478-0079-0
  • Pierre Faveton, Les Cannes, Massin, (Paris), ISBN 2-7072-01324
  • Jean-Luc Fayet, La Canne au pays du couteau, (Thiers 1988)
  • Sylvie Girard, Cannes et parapluies et leurs anecdotes, MA éditions, (Paris 1986)
  • (de) Ulrich Klever, W. Heyne Verlag, Stöcke, (Munich 1980)
  • (de) Ulrich Klever, Spazierstöcke, Zierde, Werkzeug und Symbol, Callwey Verlag, (Munich 1984)
  • (en) Oliver Selfridge, Sticks, Houghton Mifflin Company, (Boston 1967)
  • (en) Jefftrey B. Snyder, Canes, from the Seventeenth to the Twentieth Century, Schiffer Publishing Ltd, (Atglen (USA) 1993), 200 pages
  • (en) Kurt Stein, Canes & Walking Sticks, (York (Pennsylvania) 1974), 175 pages, ISBN 978-0873870382
  • (de) Roven Verlag, Wanderstöcke, (1982)

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